L’IMPERFECTION HEUREUSE

22 juin 2022

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Parfaitement imparfaites, la vie de famille et la vie tout court sont une collection de gaffes et de dégâts, de loupés et de nouveaux départs…

Autant cultiver la grâce de l’imperfection dès le plus jeune âge. Car nul besoin d’être parfait pour être aimable !

PAR STÉPHANIE COMBE – PROPOS RECUEILLIS PAR MAGALI MICHEL

En bonne perfectionniste, je suis toujours à la poursuite d’un objectif ! Même pour bronzer, il me faut du résultat… donc pas question de bronzer n’importe comment. Bref, le perfectionnisme et moi, c’est une vieille histoire.

J’avais 21 ans quand j’ai découvert l’ennéagramme et ce trait de ma personnalité (un système d’étude de la personnalité composé d’un diagramme et de neuf structures de caractère. La rigueur personnelle et les idéaux élevés caractérisent le premier type de personnalités, Ndlr). Depuis, je m’efforce de pondérer ce fonctionnement consécutif à une blessure. C’est un travail de longue haleine car je suis capable de mettre tout mon perfectionnisme à me « dé perfectionner » ! En m’intéressant de plus en plus au sujet, j’ai surtout constaté qu’il était ambiant. Notre société souffre de perfectionnisme. Avec son efficacité, son rendement et le poids des apparences exacerbé par les réseaux sociaux, on est tous plus ou moins embarqués dans cette course au zéro défaut si socialement correcte.

Or le drame du perfectionniste, c’est de croire que pour être apprécié et aimé, il lui faut être irréprochable.

C’est très lourd. Ce tempérament vit en permanence avec un juge intérieur. Il a des exigences, se fixe des objectifs beaucoup trop élevés avec un risque de se déconnecter de lui-même au nom d’un idéal très élevé. Pour être aimé, le perfectionniste n’écoute plus ses besoins et masque ses failles. Il est en outre très fragile, sensible aux critiques qui le blessent très profondément. Il court le risque de ne pas être aimé alors qu’il y aspire plus que tout. Pire, le perfectionniste n’ose pas demander car il a peur d’être rembarré. Il peine à reconnaître qu’il a besoin d’autrui. Comme on juge l’arbre à ses fruits, on repère un travers à ses effets délétères. Le perfectionniste est souvent très fatigué car il dépense une énergie folle à courir après ses multiples projets. Il a cent chantiers en cours, qu’il peine à prioriser. Il procrastine. Il freine des quatre fers. Il s’en veut. Ce type de personnalité peut déprimer face à la barre qu’il a placée trop haut.

S’ACCEPTER

Comment s’en sortir ? Plus que quiconque, le perfectionniste a besoin de gratuité. L’amour de ses parents, l’affection de ses amis qui l’ont vu grandir ou des petites grands-mères de la paroisse, c’est très réparateur pour lui. Amour, amitié, le perfectionniste a juste besoin de se sentir aimé pour lui-même. Ensuite, humour et autodérision seront ses armes fatales. Savoir s’arrêter sur son objectif ou sur son stress et se dire que la terre va continuer à tourner alors que ses plants de tomates jaunissent ou que sa quiche est trop salée, c’est le pas de côté qui sauve le perfectionniste de la noyade. Ses tomates pousseront mieux l’année prochaine et l’important, c’est de passer un bon moment ensemble. Ce n’est pas parce qu’on fait tout bien qu’on ira mieux. Mieux vaut savourer les joies et collectionner les occasions de rire de soi.

Le perfectionniste doit avant tout accepter ses limites, ses défauts et son humanité faite de pleins et de creux. Ce qui m’a beaucoup aidée, ce sont les deadlines, les dates limites, en bon français. Dans mon métier de journaliste, mieux vaut un article rendu qu’un article en retard ! C’est la loi de Pareto en économie – 80 % des résultats s’obtiennent avec 20 % d’efforts – appliquée à la psychologie. C’est certes frustrant de poser son stylo, mais bien souvent la copie d’un perfectionniste remplie à 50% est déjà largement satisfaisante. Il peut être fier de ce qu’il a déjà accompli !

Enfin, il n’y a pas de formule magique pour se libérer du regard des autres. L’homme étant un être social, le besoin de reconnaissance par les pairs existera toujours. On renforce toutefois l’estime de soi en s’appliquant à mieux connaître ses talents et compétences.

Il ne faut pas oublier non plus que l’échec fait partie de la vie. L’essentiel est d’en tirer de bonnes leçons et de persévérer. Dédramatiser, constater que l’enjeu n’est pas si énorme et qu’on apprend comme cela aussi, c’est la vie quotidienne. Jane Nelsen, la fondatrice de la discipline positive, valorise l’erreur comme une formidable opportunité d’apprentissage.

Côté spirituel, l’expérience de l’amour de Dieu et de sa miséricorde inimaginable est un baume. Dieu nous regarde. Il ne regarde pas nos défauts, nos fautes ou nos péchés. Il nous ouvre les bras. La difficulté du perfectionniste à se sentir digne d’être aimé peut se transformer en porte d’entrée pour la grâce. Et pan pour qui se croyait impardonnable !

4 PAS EN DIRECTION DE L’IMPERFECTION HEUREUSE

1. Sortir du cocon de l’imperfection

Tremblez mais osez ! Sortez de votre zone de confort. Pour se libérer du besoin de réussir à tout prix, on peut accepter de redevenir un apprenant, de repartir à zéro ou d’oser quelque chose qui n’était pas « dans nos cordes » initialement. Se jeter dans l’inconnu, apprendre à faire confiance, à ne pas tout maîtriser donne un nouvel élan. Seuls ceux qui ne font rien ne commettent pas d’erreur et pourtant toute leur vie en est une ! Il faut oser quitte à échouer pour rebondir ensuite. Si on se met trop de limites, on ne vit pas et c’est triste.

2. Apprendre à dire non

Jésus lui-même nous montre l’exemple. Nous devons parfois nous départir d’auto-exigences excessives héritées d’une éducation catho-scoute loyaliste. Osons refuser, préserver un équilibre, demander des services et des conseils aux autres… Et surtout, demander précisément en quoi consiste l’engagement plutôt que de le découvrir après l’avoir accepté.

3. Oublier Monsieur Solution

Je ne suis ni Madame ni Monsieur Solution… En tant que parents, face à l’enfant hyper-dépendant de soi, on peut se sentir omnipotent – tout-puissant –, capable d’apporter à nos enfants une solution sur un plateau au moindre de leurs problèmes. Le risque est élevé de finir par pourvoir à tous leurs désirs avant même qu’ils ne les expriment ou ne ressentent le manque, ce qui n’aide les enfants ni à grandir, ni à accepter petit à petit qu’eux-mêmes posent leurs propres choix, se trompent parfois, mais apprennent de leurs erreurs et repartent de plus belle.

4. Oser la confession

Ouvrir sa vulnérabilité à l’amour de Dieu, à son regard indulgent qui pardonne tout quoi qu’on ait fait et refait, c’est juste dingue ! La confession, c’est l’immersion dans un amour total, renouvelé et qui ne se lasse pas. À une femme qui se plaignait de faire toujours les mêmes fautes, un prêtre disait avec humour : « On ne vous a pas demandé d’en inventer de nouvelles ! » Sans doute confesserons-nous toute notre vie le même penchant à la jalousie, le même orgueil… mais c’est par là que Dieu veut nous rejoindre et entrer en nous. Nos péchés sont les portes d’entrée de la grâce.

TÉMOIGNAGE : « J’AI BEAUCOUP DE TENDRESSE POUR LES PERFECTIONNISTES »

Médecin et mère de trois enfants, Muriel a accepté d’accueillir les surprises du quotidien.

« Perfectionniste et sans cesse tendue vers un objectif, j’ai fini par comprendre que je m’en demandais trop. J’ai appris à accepter d’accueillir les surprises du quotidien. Mon rêve de perfection a pris racine dans la faille de l’anxiété et du manque d’estime de soi. Dès que je suis devenue capable de m’aimer dans mes échecs, de rire de moi, de me regarder “sans maquillage”, de prendre du recul sur ma vie en cherchant davantage l’amour de Dieu, alors mon perfectionnisme n’a plus eu lieu d’être. Je conserve néanmoins beaucoup de tendresse pour ce fonctionnement dans lequel j’aperçois “le petit enfant en chacun de nous” qui persiste à chercher l’approbation de l’adulte. »

POUR ALLER PLUS LOIN

Belles-mères & belles-filles
Stéphanie Combe, Quasar, 2021, 160 pages, 13 €.

 

 

Ouf ! Maman part au couvent
Stéphanie Combe, Quasar, 2019, 200 pages, 14 €.

 

 

 

Imparfaite et débordée, chronique d’une maman d’aujourd’hui
Raphaëlle Simon, Salvator, 2016, 192 pages, 14,90 €.

 

 

 

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