Le Linceul de Turin est-il celui du Christ ?

27 juin 2010

jacques

Controverse. Le célèbre linceul est exposé jusqu’au 23 mai à Turin, en Italie. Plus de deux millions de visiteurs sont attendus. Pourtant, en 1998, il a été daté du 14e siècle, grâce au carbone 14. Le débat est-il clos ?

Débat entre Jacques et le professeur Philippe Quentin

« La science a prouvé que le linceul ne date pas de l’époque du Christ  »

1 On nous reparle encore du Linceul de Turin, alors qu’on sait bien qu’il est l’œuvre d’un faussaire du Moyen Âge…

 Sachant que le Suaire existe depuis au moins fin 1356 et pour peu que l’on connaisse les propriétés extraordinaires de l’image qu’il porte, tant dans sa facture que dans son contenu, on ne peut que rester confondu par le génie hors du commun du faussaire médiéval, auteur présumé d’un tel ouvrage. Ce linceul présuppose en effet des défis techniques brillamment surmontés et un ensemble considérable de connaissances historiques et médicales impeccablement mises en œuvre. Cette hypothèse d’un faussaire médiéval est plutôt difficile à croire !

2 Qu’est-ce qui vous fait dire avec autant d’aplomb qu’on ne sait pas comment on a pu fabriquer cette image ? Pourquoi ne serait-ce pas une sorte de peinture ?

Une peinture ou un dessin se caractérise par le dépôt d’une matière étrangère à son support : toile, papier, mur… Or des analyses optiques très précises et concordantes ont montré sur le Suaire que rien n’a été ajouté au linge là où l’image de couleur jaune pâle est présente. Il s’agit en fait d’une coloration superficielle mais « dans la masse » : le tissu est roussi, comme s’il avait été légèrement brûlé en surface. On a pu reproduire cette modification en bombardant un tissu de lin avec des protons sortant d’un accélérateur de particules porté à une différence de potentiel de l’ordre du million de volts. C’est à ma connaissance la seule façon connue de produire une telle coloration superficielle. Ce type de technique n’est pas aisément concevable au Moyen Âge… Rien n’exclut d’autres processus. À ce jour, on n’a pas la moindre idée de ce qu’ils pourraient être.

3 Pourtant, certains ont reproduit de telles images par contact d’un linge avec une statue.

Quand on ne connaît pas bien le Suaire, on peut effectivement le penser. Mais pour ceux qui sont familiers avec cet objet, le prétendre s’apparente plus à un gag, voire à une grossière manipulation, qu’à une réelle avancée de nos connaissances sur le Suaire. De trop nombreuses propriétés de l’image ne sont pas compatibles avec cette prétendue explication : la coloration dans la masse et sa superficialité uniforme que nous venons d’évoquer, la résolution des détails du corps représenté, le codage graduel d’informations sur le relief de l’objet qui donne une étonnante image en trois dimensions, pour ne citer que ces exemples.

4  Admettez quand même que la science a définitivement prouvé que le linceul ne date pas de l’époque du Christ. En 1988, trois laboratoires scientifiques ont utilisé la méthode de datation au carbone 14 avec des échantillons du Suaire. Leur résultat est sans appel : ils le datent entre 1260 et 1390.

Tout d’abord, il faut reconnaître que même si le prélèvement des échantillons ayant servi à cette mesure a été effectué dans des conditions d’amateurisme un peu désolantes, la qualité des équipes, le traitement des échantillons et la méthode employée sont, a priori, hors de cause. Si on veut questionner le résultat de la mesure exprimé en âge du Suaire, on peut se poser deux questions.

« La prudence s’impose dans les conclusions sur l’âge du Suaire »

La première porte sur l’éventuelle présence de pollution de carbone organique récent sur les échantillons du Suaire de nature à le « rajeunir » artificiellement. Il faudrait néanmoins une très importante proportion de carbone polluant, pour se tromper de treize siècles et ramener ainsi l’âge réel du linceul à l’époque de la vie de Jésus. Or, récemment des études scientifiques menées par R.N. Rogers ont fortement accrédité l’idée que les échantillons (prélevés à un coin du Suaire) pourraient ne pas être représentatifs du reste du tissu et qu’ils appartiendraient à une zone rapiécée très soigneusement au XVIe siècle (avec du lin, du coton et une gomme organique pour en harmoniser la couleur).
La seconde porte sur la datation au carbone 14. Elle suppose que le linge n’a pas subi d’irradiation de nature à changer sa composition isotopique. Cela peut sembler assez peu probable. Sauf que, comme on l’a vu, une hypothèse plausible (au plan physique sinon historique) de formation de l’image fait justement appel à un processus de transmutation nucléaire… En ce cas, les mesures du carbone 14 seraient faussées. En attendant que l’archevêché de Turin consente à faire effectuer une étude sérieuse et ouverte sur le reste de tissu prélevé, la prudence dans les conclusions sur l’âge du Suaire s’impose donc.

5 Admettons que le linge puisse dater d’avant la fin du XIIIe siècle, et donc par hypothèse, du premier siècle, qu’est-ce qui prouve que ce linceul ait servi à l’ensevelissement du Christ ?

Rien ne le prouve vraiment. Un faisceau d’éléments converge cependant dans ce sens. Cet objet offre en particulier une représentation précise et étonnamment pertinente à beaucoup de titres de tous les détails de la Passion du Christ, rapportés par les Évangiles. Mais bien sûr, ces éléments ne prouvent rien ! Tous ces détails, aussi précis et parfaits soient-ils, ne prouveront pas l’authenticité du linceul, tant qu’on n’aura pas expliqué comment et quand l’image a été formée.

6 Mais enfin pourquoi l’Église veut-elle à tout prix nous faire croire que c’est le linceul du Christ ?

Pas du tout ! L’Église ne se prononce pas sur l’authenticité de cette pièce de lin comme linge mortuaire du Christ. Elle s’est toujours refusée à se servir du Suaire comme une preuve de la Résurrection du Christ. Rien ne remplace la démarche libre de la foi. Elle est d’ailleurs d’autant plus un acte libre qu’elle n’est contrainte par aucune prétendue preuve.
Il n’en est pas moins vrai que le linceul donne à voir une part du mystère. La fascinante concordance entre ce qu’on voit sur cette image et ce qu’on lit dans les Évangiles en fait une incomparable icône. C’est pourquoi l’Église encourage la démarche de pèlerinage auprès du Suaire pour contempler la Passion du Christ et sa Résurrection.

7 Mais vous, que dites-vous du Suaire ? Authentique ou pas ?

J’ai une intime conviction que je ne vous confierai pas ! En effet, pour vous et moi, il y a plus important que de savoir si ce linceul est celui du Christ. Pour le croyant, il y a dans chaque église infiniment plus que ce que l’on conserve à Turin : Jésus vivant et agissant dans le cœur de ceux qui le désirent. Alors, devant le visage de l’homme du Suaire, interrogeons plutôt celui qui y est représenté. Il a beaucoup à nous dire…

Jacques

Professeur d’histoire en fac Les questions de science le passionnent. Il s’est beaucoup documenté sur le Suaire de Turin. Pour lui, il ne s’agit pas du linceul du Christ.

Professeur Philippe Quentin

Professeur émérite de Physique Nucléaire Théorique à l’Université Bordeaux 1

Le visage du linceul

Le Linceul de Turin est un drap de lin portant l’empreinte d’un homme fouetté et crucifié. Ce tissu mesure 4,36 sur 1,10 mètres. Ce n’est qu’en 1898, quand Secondo Pia prit les premiers clichés du linceul, que cette image est apparue sur les négatifs telle qu’on la voit ci-dessus. Elle révéla alors au monde entier le visage de l’homme du linceul, difficilement visible à l’œil nu.

Dans la Bible

« Simon-Pierre entre dans le tombeau, et il regarde le linceul resté là, et le linge qui avait recouvert la tête, non pas posé avec le linceul, mais roulé à part à sa place. (…) Il vit, et il crut. » Saint Jean, 20, 6-7.

Pour aller plus loin :
Que penser du Suaire de Turin aujourd’hui ?, Philippe Quentin Ed. Emmanuel, 2001.

Guide du Linceul de Turin, Association « Montre-nous ton visage » Ed. Téqui, 2010.

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