Les chrétiens sont-ils homophobes ?

13 avril 2013

Père Joël Pralong

Débat. De nombreuses personnes homosexuelles se sentent jugées, voire condamnées par l’Église, et pensent qu’elles n’y ont as leur place. Qui adit que Dieu n’aimait pas les homos ?

Débat entre Lili Sans-Gêne et le Père Joël Pralong

1 L’Église n’aime pas les homos, elle les juge et les culpabilise au lieu de les accepter tels qu’ils sont!

Tout d’abord, Lili, l’Église, comme la Bible, juge les actes, jamais les personnes : c’est très différent. Ensuite, dis-moi, Lili, l’Église c’est quoi, c’est qui exactement? L’Église, elle commence chez ce simple baptisé qui me respecte, me regarde avec compassion, prêt à dialoguer avec moi, sans préjugés, me gratifie d’un sourire, m’offre un simple verre d’eau, au nom de son appartenance au Christ… Il est sans doute possible que dans leur formulation, certains textes donnent parfois l’impression d’être culpabilisants et blessants pour des personnes qui n’ont pas choisi d’être homos, et qui cherchent humblement leur chemin dans la société et dans l’Église. C’est sur le terrain que les chrétiens doivent changer de regard et s’engager pour aider les plus faibles. D’ailleurs, de nombreux textes de l’Église invitent les chrétiens à faire bon accueil aux personnes homosexuelles,« avec respect, compassion et délicatesse» (Catéchisme de l’Église catholique). La première démarche évangélique n’est pas de savoir si deux personnes qui s’aiment vivent dans les règles, mais de valoriser tout ce qu’il y a de beau dans leur vie, et de leur indiquer des chemins de progrès à la lumière de l’Évangile.

2 La seule chose que vous proposez aux homos,c’est la chasteté. L’Église a toujoursdes problèmes avec le sexe!

Tout le monde a des problèmes avec le sexe : les gens mariés, les clercs, les célibataires, les homos… En fait, la sexualité ressemble à un puissant pur sang, un magnifique étalon, que tu dois continuellement apprivoiser, dompter, tenir en bride, sinon tu vas droit dans le mur… La chasteté, c’est la force du cavalier, cette qualité du cœur et de l’intelligence qui maîtrise l’emballement de la sexualité, qui la remet à sa juste place : au service de l’amour. La chasteté est un facteur d’équilibre personnel et de juste relation aux autres, empreinte de respect et de considération (ce thème, je le développe abondamment dans mon livre). Rien à voir avec du« pas touche » ! On ne bâtit pas sa vie sur des règles ou sur des interdits, mais uniquement sur de l’amour, et l’amour accueille, dialogue, cherche… On ne peut aider qu’en aimant. Bien entendu, l’amoura aussi ses exigences.

3 On voit bien que dans le meilleur des cas, vous éprouvez de la compassion pour les homos : c’est bien la preuve que vous les considérez comme des malades.

Moi, j’éprouve de la compassion pour toute personne qui souffre, et qui n’est pas forcément malade. L’inclination homosexuelle n’est plus considérée comme une maladie ni comme un vice, fort heureusement ! On ne connaît pas vraiment ses causes : hérédité ? Blocage durant l’éducation ? Problèmes hormonaux ? Conséquence d’un viol, d’une carence d’amour chez le petit enfant ? Bref, toutes les hypothèses sont permises. Ce que je constate, c’est qu’au point de départ, on ne choisit une orientation homosexuelle : on découvre en soi cette inclination. Mon propos ne s’intéresse qu’aux personnes à l’orientation sexuelle non choisie, et établie comme un fait, et qui en souffrent. Point. La prise de conscience de son homosexualité est toujours une souffrance, une lutte, un deuil par rapport à un idéal de vie, une angoisse terrible confrontée au regard des autres, qui peut conduire au suicide. En écrivant un livre sur le suicide des jeunes, j’ai constaté que, selon des enquêtes sérieuses, 25 % des suicides, chez les jeunes, étaient liés à la prise de conscience de leur tendance homosexuelle. Cela m’a alarmé à un tel point que j’ai décidé d’écrire un livre sur ce sujet.  Lorsqu’un jeune, par exemple, est condamné à s’enfermer dans son lourd secret, par peur d’être jugé, cela peut le conduire à toutes sortes de comportements marginaux, en ghetto (boîte, club gay, érotisme débridé, dépression, etc.).

4 Justement, ces jeunes ont déjà suffisamment souffert : ils ont besoin d’être aidés…

D’où l’importance d’un lieu de parole, de confidence, d’échange avec d’autres, et donc de compassion ! L’Église, imprégnée d’Évangile, doit offrir cette oreille d’écoute, qui aide chacun à trouver son chemin. La population homosexuelle est en droit de recevoir une telle aide. Quand, d’abord, on se sent accueilli et aimé, les tourments s’apaisent, la conscience s’éclaire, les vraies questions se posent en toute quiétude, et chacun peut de venir disciple du Christ, se remettre en route, à partir du point où il est. De tout mon coeur, je demande au Seigneur que cette Église que j’aime, mon Église, ressemble de plus enplus à l’école du Christ doux et humble de coeur, où l’on apprend à porter joyeusement le joug du disciple, tout en se délestant enfin de ces fardeaux trop lourds à porter (cf.l’Évangile selon saint Matthieu, 11,28-30). Imaginez maintenant, vousqui êtes de solides parents cathos, avec des principes bien établis, que votre propre enfant de 22 ans vienne vous crachoter à l’oreille : « Je suis homo… mais ce n’est pas de ma faute ! » (et j’en connais beaucoup de ces situations). Mon Dieu, comme vous allez vite changer de regard etd e point de vue ! Après un temps de surprise, voire de grande souffrance, vous allez vous demander comment aider votre enfant. Et surtout, vous allez continuer de l’aimer, pas vrai ? Voilà quel doit être le regard de l’Église, sur le terrain : un regard qui aime, qui accompagne et cherche un chemin avec chacun.

Joël Pralong

Après une formation d’infirmier en psychiatrie et deux ans de pratique, Joël Pralong entreprend des études de théologie à Fribourg. Ordonné prêtre en 1984, il est aujourd’hui curé dans le diocèse de Sion (Suisse). Il a publié Le vertige du suicide, Lettre aux proches désemparés, Éd. des Béatitudes, 2012 et Mais qui a dit que Dieu n’aimait pas les homos ?, Éd. Saint-Augustin, 2013.

TEMOIGNAGE : Marc
« J’ai 26 ans et je porte en moi cette inclination homosexuelle (je refuse, consciemment, de dire « je suis » homosexuel, parce que je refuse d’être réduit à cela). Je voudrais témoigner de l’accueil qui m’a été fait dans l’Église. Avant ma conversion, lorsque je parlais de mon homosexualité, j’étais content lorsque mes interlocuteurs n’y trouvaient rien à redire, ou m’encourageaient dans cette voie (avec un désir sincère de m’aider, j’en suis convaincu), mais je n’étais pas entièrement satisfait : la satisfaction passagère d’avoir l’illusion d’être « accepté » s’en allait bien vite, et je me retrouvais à nouveau seul, avec ce grand désir d’être reconnu et aimé. Ces personnes avaient beau m’accepter comme ça, ça ne suffisait pas. Parce que quelque chose en moi, n’acceptait pas la vie que je menais. Il fallait toujours plus, toujours plus de preuves de l’acceptation et de la reconnaissance des autres. Aujourd’hui, je sais que cela était dû à l’impossibilité d’être satisfait par la vie que je menais. Cette acceptation, je l’ai trouvée dans l’Église. Jamais, je n’avais été accueilli avec autant de gentillesse et de compassion. C’est par « la charité dans la vérité » dont témoignaient ces personnes, que j’ai enfin trouvé la véritable compassion, qui ne consiste pas à dire à quelqu’un : « Fais ce que tu veux, tant que tu ne fais de mal à personne, ce n’est pas grave », mais à s’intéresser en vérité à la vraie dignité de la personne. Ne plus être réduit à l’homosexualité, mais avoir été regardé comme une personne à part entière, dont la dignité dépasse cette étiquette d’homosexuel, m’a libéré. C’est dans l’Église que j’ai trouvé la liberté. J’ai mis du temps à accepter l’enseignement de l’Église, mais je l’ai fait librement : jamais personne ne m’a incité ou forcé à ne plus vivre l’homosexualité. On me donnait l’enseignement de l’Église et on me l’expliquait, mais on me laissait libre de le suivre ou non… Pas comme la pensée unique dominante où, là, vous n’avez pas d’autre choix que d’y croire… C’est dans l’Église que j’ai trouvé la liberté, parce que c’est l’Église, par son enseignement, qui m’a fait comprendre que mon mal-être et ma recherche effrénée de reconnaissance étaient simplement
dus au fait que je n’étais pas libre, mais enchaîné par mes pulsions et mes désirs impossibles. « La vérité vous rendra libre » : parfois on ne veut pas l’accepter, on met souvent du temps, mais quand on finit par n’en plus pouvoir, et qu’on se laisse aller à la confiance… on découvre un trésor que l’on ne soupçonnait pas : la vie avec le Christ, le Seul qui peut réellement
combler tous nos vides et nous relever, si on veut seulement Le laisser faire. »

Pour aller plus loin :

Mais qui a dit que Dieu n’aimait pas les homos ?Joël Pralong, Éd. Saint-Augustin, 2013

Regard chrétien sur l’homosexualitéMarc-Antoine, Costa de Beauregard, L’OEuvre Éd., 2013

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