Et si on essayait l’éducation positive ?

6 septembre 2017

education positive

Famille. Et si les comportements parfois pénibles ou incompréhensibles des enfants, exprimaient en réalité des besoins profonds ? Explications d’Isabelle Filliozat.

Recueilli par Émilie Pourbaix

Non, la mauvaise graine n’existe pas ! Nombre de parents croient que leur rôle est de poser des limites et que l’amour est une récompense, ils sont habités par la profonde conviction que les punitions sont nécessaires et peuvent être justes. Pour certains, gifles et fessés font partie de l’arsenal éducatif naturel d’un parent. Malgré leur inefficacité sur les comportements de l’enfant à long terme, ces croyances ne sont pas faciles à remettre en cause.

Les comportements de nos enfants ne sont jamais dirigés contre nous mais vers nous, comme des appels, parce que nous sommes leurs parents, ceux à qui ils font confiance pour les soutenir et les guider dans la vie. Leurs comportements, pour désagréables ou agressifs qu’ils soient, sont des réactions. Ils ont donc des causes. L’enfant ne réagit ainsi ni par hasard, ni par intention de nuire. Alors, poser à haute voix la question : « Que se passe-t-il ? » sera notre sésame pour nous aider à inhiber nos propres automatismes, à penser à respirer et à procéder à l’analyse de la situation. Il est important de ne pas se piéger dans l’idée qu’une seule attitude, donc une seule solution, serait possible. Auquel cas nous chercherions « la bonne solution ». Non. Chaque solution a ses conséquences. Vers un même objectif, différentes routes sont souvent possibles.

Nombre de nouvelles compétences de parentalité positive auront un impact instantané. Pour d’autres, il peut y avoir un temps de latence pendant lequel l’enfant est sur ses gardes.

Un temps pour lui 

Consacrer du temps à notre enfant, sans répondre à notre propre téléphone ni penser à la liste des courses ; un temps dédié durant lequel nous suivons ses consignes, loin d’être une perte de temps, en gagne énormément. Quand il demande quelque chose, il nous arrive de dire : « Je n’ai pas que ça à faire. » Réfléchissons-y à deux fois. Car y a-t-il plus grande urgence que de passer du temps de bonheur ensemble ? Et quand il nous arrive de penser que ses jeux ne nous intéressent pas, souvenons-nous que nous ne jouons pas aux voitures, à la poupée, aux Legos ou au Monopoly, nous jouons avec l’enfant ! Certes, nous avons nos  références, mais comment demander à un enfant de faire un effort pour telle ou telle chose importante pour nous, si nous ne savons pas lui montrer que nous aussi sommes capables de faire telle ou telle chose importante pour lui ? Jouer avec l’enfant est probablement plus important et même plus efficace pour ses résultats scolaires que de l’aider à faire ses devoirs ! Lui donner du temps le valorise bien plus que mille félicitations. Le simple fait de prendre du temps avec lui et d’y prendre plaisir lui donne le sentiment d’avoir de l’importance, de la valeur ! N’est-ce pas ce que nous désirons plus que tout, que nos enfants aient le sentiment d’avoir de la valeur en tant que personnes ? Nous voulons aussi que nos enfants se fassent moins de nœuds émotionnels que nous ! Ces nœuds sont formés par la peur. Peur de la punition, du rejet, de ne pas avoir de récompense, d’être désapprouvé, de perdre l’affection, d’être grondé ou de recevoir des coups. Tout ce qui altère leur sens de connexion avec l’adulte qui s’occupe d’eux va déclencher une subtile ou intense anxiété, qui va se développer en stress constant, comportements excessifs, insécurité, peurs nocturnes, agression, défiance.

L’éducation, une relation 

C’est aujourd’hui une certitude, l’histoire d’un individu, et plus précisément son histoire relationnelle, le façonne. La maturation du cerveau humain est influencée par les interactions de l’enfant avec son environnement physique, émotionnel et social. L’éducation est avant tout une relation. Privilégier cette dernière est toujours prioritaire. De l’agressivité aux mauvais résultats scolaires, une mauvaise relation entraîne toutes sortes de symptômes. Une bonne relation permet en revanche de faire face aux difficultés et de surmonter, ensemble, les obstacles. Et pourtant, nous oublions trop facilement cette priorité. Préserver la relation ne signifie pas pour autant chercher à se faire aimer en leur « passant » tout. Un doute ? Je privilégie le cœur ! L’amour et le lien, premières nourritures de ma jeune pousse, seront toujours le meilleur choix.

Isabelle Filliozat

Psychologue, elle a écrit dix-huit livres sur les émotions et l’aide à la parentalité. Elle donne de nombreuses conférences, forme des professionnels à sa démarche de coaching parental et propose des ateliers sur une approche positive de l’éducation.
www.filliozat.net / www.filliozat-co.fr

7 clés pour éduquer de manière positive

1 Agressivité, fuite ou inhibition. Ce sont les signes que les structures supérieures de son cerveau sont déjà dépassées ; réfléchir n’est plus possible, l’enfant a d’abord besoin de calmer ses circuits cérébraux. Ma trousse pour l’aider à calmer le stress dans son cerveau : le contact physique, la tendresse, la voix réconfortante du parent, les manifestations d’attachement. Une respiration profonde et tranquille. L’attention portée aux sensations internes. L’accueil de l’expression émotionnelle. Un verre d’eau. La vue de verdure. L’exercice physique. La musique. Le rire…

2 Remplir son réservoir affectif. Une bonne disponibilité intérieure et une belle quantité d’énergie sont nécessaires pour grandir, réfléchir, apprendre, ou modifier un comportement. Pour rompre le cercle vicieux du stress (agressivité –> punition [ressentie comme un retrait d’amour] – > stress – > agressivité, etc.), je remplis le réservoir affectif de mon enfant : je souris, je joue et je ris avec lui, je réponds à ses demandes, j’écoute ses émotions, je lui fournis proximité et contact. Je lui donne dix à vingt minutes par jour de véritable attention. Ce faisant, je me nourris moi-même !

3 Une crise de rage disproportionnée. Il décharge sur moi sa fureur parce qu’il a confiance en moi. Les crises se répètent ? L’enfant a un souci, une angoisse. Tout d’abord, je remplis son réservoir d’attachement. Une fois son cerveau de nouveau capable de réfléchir, je l’écoute ou je joue avec lui pour l’aider à identifier ce qui lui pose problème. Quand l’enfant ne sait pas mettre des mots sur son malaise, à moi, le parent, de réfléchir. Quel pourrait être le traumatisme ou le souci à l’origine de cette accumulation de tensions ? Mésentente du couple parental, violence d’un parent, décès ou maladie d’un proche insuffisamment parlés, déménagement, naissance d’un petit frère, avortement, injustice entre enfants, harcèlement de la part de camarades, ennui ou humiliations à l’école… ? J’explore avec lui ce qui peut lui peser.

4 Éviter le rapport de force. Un problème ? Première urgence, restaurer le contact et éviter le rapport de force. Pourquoi pas un temps partagé ? Faire un gâteau, jouer, aller courir ensemble dehors. Le coin pourrait se révéler une chouette idée finalement. À condition que ce soit un coin qui permette réellement de trouver des ressources pour un meilleur comportement. Ce coin sera donc un lieu accueillant, confortable et chaleureux pour que le cerveau se sente suffisamment en sécurité, et permettre aux zones exécutives frontales de s’activer. Mon objectif n’est pas que l’enfant « paie » mais qu’il change de comportement.

5 Mon propre réservoir est percé. Parfois, c’est notre propre réservoir qui est percé… Nous sommes fatigués, stressés… et nous manquons de tendresse et de contact. L’enfant se colle à nous non pour se remplir lui, mais pour nous assurer de son amour. L’urgence est de nous occuper de nous, de retrouver du goût à la vie, de résoudre nos propres problèmes, de tisser des liens… pour libérer notre enfant de cette tâche trop lourde pour lui de nous rendre heureux. N’oublions pas que nous ne sommes pas la seule source d’attachement de l’enfant.

6 Créer un moment d’intimité. Lors d’un trajet, en préparant le repas ou le soir au coucher, dans un moment calme de préférence, je crée un moment d’intimité. Je commence par rester silencieux et écouter. Puis j’ouvre. C’est un partage, pas une enquête. Je parle moi aussi de ce que j’ai aimé et moins aimé dans ma journée. Puis : « Et toi, qu’est-ce qui t’est arrivé de plus sympa aujourd’hui ? » « Qu’as-tu fait aujourd’hui qui t’a fait te sentir fier de toi ? » « Qu’est-ce que tu as préféré aujourd’hui ? » Enfin, je peux aborder : « Qu’est-ce qui a été le plus dur dans ta journée ? »

7 Jouer avec lui. Je mets en place la situation à l’aide de poupées, peluches, figurines et, tout en restant très présente, je le laisse poursuivre le jeu. Si j’anime un personnage, je demande à l’enfant ce qu’il a envie de faire, ce qu’il dirait… Il est important de toujours laisser l’enfant maître des mouvements et des paroles des personnages. Le parent est un facilitateur : je fournis support et encouragements, mais les solutions viennent de l’enfant. Je me contente de lui permettre d’élaborer et de tester différentes solutions à son problème. Je peux aussi utiliser les contes, recourir aux métaphores, pour lui donner des idées et des ressources.

Pour aller plus loin :

« Il me cherche » Comprendre ce qui se passe dans le cerveau de votre enfant entre 6 et 11 ans, Isabelle Flliozat, Poche Marabout, 2016

« J’ai tout essayé » Isabelle Flliozat, Poche Marabout, 2016

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