Après un décès. Face au drame de la mort d’un être cher, les rites funéraires sont là pour aider à avancer sur le chemin du deuil. Vers la vie.
Propos recueillis par Christian de Cacqueray.
Les obsèques sont un véritable parcours qui conduit le défunt du lieu de son décès vers celui de sa dernière demeure. Chaque étape des funérailles est très importante : elle symbolise celles du deuil à venir pour les proches. Et les aide à se séparer progressivement du défunt.
La veillée
La première étape du parcours se passe autour du corps de l’être cher, juste après la mort, dans l’intimité : elle a lieu parfois dans la chambre (malheureusement de moins en moins souvent) mais le plus souvent au funérarium ou à l’hôpital. C’est le lieu d’un « entre-deux ». Le statut du corps est encore intermédiaire : il est entre les êtres vivants et morts. C’est le temps des sens : on peut encore le toucher, le regarder. C’est aussi celui de la veillée autour du corps, si importante. Elle permet de prendre conscience de la réalité de la perte et empêche le déni. L’être humain a besoin de voir le mort, le toucher, l’embrasser, pour prendre conscience qu’il n’est plus dans cette enveloppe charnelle. La relation charnelle se termine devant le corps mort. Il est nécessaire de prendre conscience de la réalité de la perte. Pour cela, le moment de l’adieu au visage est très important. Dans ce temps de la veillée, la parole de la mort s’exprime avec intensité, pour ceux qui acceptent de s’en approcher. Dans cette étape, chacun est interpellé aussi sur son propre destin, son devenir mortel, sur la question du « pourquoi » de sa vie…
Le cadre collectif
À partir de la fermeture du cercueil, la deuxième étape des obsèques commence. On passe d’un cadre intimiste – la veille du défunt – à un cadre collectif. Dans la tradition catholique française, c’est l’Église, une communauté, un lieu ouvert, qui accueille le cercueil. Les proches remettent alors le défunt à quelque chose qui les dépasse. Le mort n’est la propriété de personne. Toute vie va au-delà du cercle intime : avec l’annonce de l’enterrement, la famille ouvre le cercle. Il est bon d’associer largement au-delà du cercle intime, pour faire mémoire, célébrer la vie de la personne, qui a eu une vie professionnelle, des engagements dans la société, la vie de quartier, etc. Tout cela a sa place dans la vie d’une personne. Et à sa mort aussi. Même s’il n’y a pas de cérémonie à l’Église, il est très important d’avoir cette ouverture. Les célébrations civiles sont d’ailleurs construites sur le modèle des célébrations religieuses.
Le temps de l’adieu
Le troisième temps est celui de la mise en terre. C’est le temps de la séparation, où les vivants, ayant déposé ce corps, et lui ayant affecté un lieu de repos, de mémoire, d’ancrage dans la continuité familiale au cimetière, commencent à se poser la question de « l’après », qui est fondamentale. C’est d’ailleurs tout le sens de ce parcours de funérailles : manifester quelque chose sur ce qu’on croit être le devenir du mort. En effet, toute personne qui vit un deuil a envie d’entendre que la relation continue.
Vers la vie
Ces rites symbolisent le parcours psychologique du deuil, qui va prendre des mois, des années… Pour les vivants, il s’agit d’aller de la perte de la vie charnelle vers l’expérience d’une relation spirituelle, une ouverture vers la vie après la mort. Ce parcours va permettre aux vivants de retrouver la paix, retourner vers la vie, pour ne pas rester enfermés dans la mort, ne pas se laisser « tuer par la mort »… Par ailleurs, il met en scène la dimension collective du deuil qui n’est pas qu’un travail personnel : dans ce « travail » du deuil, toutes les personnes autour de la personne endeuillée sont concernées. Ce sont les relations qui permettent d’avancer vers la vie. Le deuil est une œuvre collective.
Propos recueillis par Émilie Pourbaix
Parcours d’adieux, chemins de vie, Christian de Cacqueray, Salvator, 2016, 18,50 €
Service catholique des funérailles
Ce service est la seule structure de pompes funèbres organisée en association à but non lucratif en France. Il est présent à Bordeaux, Lyon, Marseille, Paris, Toulon, Versailles. http://s-c-f.org
4 Clés pour Vivre des obsèques avec une crémation
Avant leur mort, de nombreuses personnes laissent des indications demandant à être incinérées. Mais cette cérémonie n’est souvent pas facile à vivre pour les proches. Comment bâtir une cérémonie qui ne soit pas traumatisante ?
1 Éviter le crématorium.
La présence de la famille n’est pas nécessaire au crématorium. Beaucoup de gens sont libérés de ne pas avoir à y aller. En ce cas, on peut faire une cérémonie à l’église, comme pour un enterrement normal, puis se retrouver pour un temps convivial après la célébration, pendant que le corps part au crématorium. On peut ensuite se retrouver pour l’enterrement proprement dit de l’urne, le même jour, ou plus tard, au cimetière.
2 Organiser une cérémonie collective.
Le crématorium est souvent un lieu fermé, réservé aux intimes. Il est bien d’accepter la mise en exposition du corps dans une célébration collective pour évoquer, célébrer toutes les dimensions de l’être disparu.
3 Enterrer les cendres.
La crémation n’implique pas nécessairement la négation de la trace du corps et la dispersion des cendres. Il vaut bien mieux enterrer l’urne dans un caveau de famille, pour garder un lieu de mémoire collectif. En effet, l’être, individuellement et collectivement, a besoin de lieux de mémoire pour se construire dans son humanité, sa filiation. Le cimetière est le lieu où s’incarne notre histoire : c’est le lieu de nos racines.
4 Prévenir.
Ceux qui choisissent la crémation pour eux-mêmes doivent en avertir leur entourage avant leur mort, afin de les préparer à ce parcours rituel qui n’est pas neutre, et qui peut être particulièrement douloureux.