Joie. Vous voulez être heureux ? Un bon conseil : faites entrer la gratitude dans votre vie ! Voici quelques précieux conseils pour voir la vie côté « merci », et choisir le bonheur. Passionnant !
Par Florence Servan-Schreiber.
C’est quoi, un kif ? Exprimer sa gratitude consiste à reconnaître, dans sa vie, ce que l’on a envie de célébrer. Un instant ou une situation qui incite à remercier quelqu’un en particulier ou la vie en général. On peut s’en parler à soi-même ou à autrui, l’écrire, l’inclure dans une lettre et, mieux encore, lire cette lettre en personne à son destinataire.
Ce qui transforme un plaisir ou un moment de grâce en kif est simplement d’en éprouver de la gratitude, d’avoir l’élan de dire merci. Car ce sont les activités ordinaires et banales qui créent des vies merveilleuses dès lors que la merveille nous frappe. Au cours d’une journée, les sensations et les émotions s’accumulent, les situations, les événements et les goûts se multiplient, mais on se prive de la moitié d’une expérience positive si on ne prend pas la peine de la célébrer. C’est pourquoi exprimer sa gratitude est une « métastratégie » pour être heureux. C’est faire preuve d’émerveillement, être capable de voir le bon côté d’un revers, remercier quelqu’un (une personne de son entourage ou Dieu) et compter ses « privilèges ». Mais c’est aussi se permettre de savourer ce qui passe, de ne pas considérer que tout est dû ou normal et savoir percevoir l’intensité du présent. La gratitude libère de l’envie : la reconnaissance de ce que j’ai m’exonère du désir d’autre chose. Cela nous permet de mieux vivre avec ce que l’on possède déjà et d’être plus généreux. Ressentir et exprimer sa reconnaissance est un formidable antidote contre les émotions négatives, l’hostilité, le tourment et l’irritation.
Plus heureux
Exprimer sa gratitude, c’est beaucoup plus que dire merci. Les recherches faites sur cette pratique révèlent que les personnes reconnaissantes sont, dans l’ensemble, plus heureuses que les autres. Elles ont plus d’énergie, sont plus confiantes et ressentent plus d’émotions positives. Elles savent surtout toutes les capter. Elles sont aussi plus enclines à aider les autres, à faire preuve d’empathie et à pardonner. Elles sont plus spirituelles et moins matérialistes. Elles résistent mieux à la dépression, à l’anxiété, à la solitude, à la jalousie et aux névroses. Rien que ça ! La gratitude se décompose en deux séquences. La première est le constat du bien dans notre vie. Avec la gratitude, nous disons oui à l’existence. Nous reconnaissons, en premier lieu, qu’elle vaut la peine d’être vécue. Puis nous nous laissons pénétrer par la reconnaissance, qui confirme que la source de ce bien-être se trouve, au moins en partie, en dehors de nous-mêmes. C’est ce qui la distingue des autres sentiments. En reconnaissant l’intervention d’un élément ou d’une personne extérieurs, nous donnons à ce bienfait une valeur différente de celle des actions que nous effectuons par nos propres moyens. La gratitude est une émotion qui demande de la réflexion et de la connexion avec l’extérieur. Ce sont ces deux facteurs qui la rendent si puissante. En l’éprouvant, nous admettons notre humanité et reconnaissons que nous ne serions pas aussi bien là où nous sommes sans l’intervention des autres ou de Dieu.
Bienfaits
Les bienfaits de la gratitude ne constituent pas qu’une sensation agréable sur le moment. Ils se manifestent à long terme dans la vie de ceux qui la pratiquent. Ces derniers résistent mieux au stress quotidien – et montrent aussi une plus grande résilience face à un stress post-traumatique –, se rétablissent plus facilement d’une maladie et sont globalement en meilleure santé. La gratitude élève notre esprit, nous inspire et nous transforme. En manifestant l’émotion que provoque en nous un événement, on se montre comme on est. La gratitude procure du sens à notre vie et la met en valeur à nos yeux. Prendre conscience de ce que les autres font pour nous et de ce que l’on a accompli par soi-même est excellent pour la confiance en soi. Écrire son journal de gratitude (voir encadré clés) renforce aussi nos relations aux autres. Même si on ne remercie pas directement quelqu’un, lui destiner notre gratitude nous permet de considérer que nous avons de très bonnes relations avec cette personne.
Propos recueillis par Émilie Pourbaix
Florence Servan-Schreiber est journaliste, conférencière et formatrice. Elle anime des «Ateliers d’inspiration au bonheur » pour permettre à chacun d’introduire les enseignements de la psychologie positive dans sa propre vie.
TROIS CLÉS POUR : Vivre dans la gratitude
Exprimer sa gratitude est une « métastratégie » pour être heureux
1. Décider. La gratitude a l’avantage d’être un sentiment que l’on peut choisir d’éprouver. Au vu de ses avantages, cela mérite d’être essayé. On peut un beau matin décider de s’y mettre. À force de s’y essayer, comme lorsqu’on apprend une langue étrangère, elle finit un jour par se pratiquer sans effort.
2. Inverser la vapeur. Éprouver de la gratitude envers quelqu’un nous préserve d’éprouver de la déception à l’égard de cette personne. Lorsque les reproches envers l’autre commencent à s’empiler, on marque une pause, on respire et on liste ce pour quoi on lui est reconnaissant. Si quelqu’un vous brise le cœur, concentrez-vous, au plus profond de la tristesse, sur la puissance de l’amour qu’il vous a permis de vivre. L’amertume se dégonfle.
3. Écrire. Il y a beaucoup de choses dans nos vies, petites ou grandes, qui nous procurent des satisfactions. Repensez aux événements qui se sont écoulés au cours de la dernière semaine et notez-en cinq pour lesquels vous ressentez de la gratitude ou de la reconnaissance. Et là on remplit trois à cinq lignes dans son cahier. Pour ceux qui aiment écrire ou que les quelques minutes nécessaires à cette pratique ne rebutent pas, c’est un excellent moyen de recenser le bon. Ma recommandation est de rendre le geste simple. Pas d’ordinateur à allumer ni de document à enregistrer. Le journal n’a pas besoin d’être régulier. Ne pas hésiter à varier les pratiques : se promener dans ses étagères pour se remémorer, en regardant ses objets, pourquoi on a aimé un livre, un lieu, une personne, fait tout à fait l’affaire.
TÉMOIGNAGE : « Un recueil de bons souvenirs »
Florence Servan-Schreiber note les meilleurs moments de sa vie dans un carnet, devenu son coffre aux trésors.
J’ai sur ma table de nuit mon « carnet de kifs ». C’est le nom que je lui ai donné. Ainsi, l’intention est claire. Je m’en empare quand j’en ai envie, quand je me souviens que je dormirai mieux en y consacrant quelques instants, quand je suis contrariée, quand j’ai vécu quelque chose d’extraordinaire, quand je me prépare pour un défi, quand je ne l’ai pas touché depuis longtemps, parfois quand je suis triste, d’autres fois juste comme ça. J’en fais un usage très aléatoire. Je n’y fais pas de phrases, juste des listes. Les lignes sont courtes, pas de superflu. Parfois je le relis. Il m’accompagne depuis quatre ans. J’ai peu de mémoire et le parcourir m’offre de revivre mon meilleur du mieux. Un recueil de bons souvenirs, d’instants uniques, une chronologie positive. Il n’y a pas un seul grincement dans ce carnet. C’est ce que j’aime chez lui. Et comme je n’en aurai pas de sauvegarde si je le perds, je ne l’emporte pas en voyage. Il habite près de mon oreiller principal. C’est sa place. Lorsque je serai une vieille dame, je le relirai goulûment. Je pense que ce que j’y trouverai m’attendrira et me consternera parfois. Je me réjouis d’avance d’avoir accès à ce baromètre des belles choses qui jonchent ma seconde moitié de vie.
Aller plus loin :
3 KIFFS PAR JOUR, Florence Servan-Schreiber, Marabout, 2013
POWER PATATE, Florence Servan-Schreiber, Marabout, 2014