Son empathie est connue sur les ondes télévisuelles et radiophoniques. Olivier Delacroix est un chercheur de sens. Il partage sa foi avec passion, le temps d’une rencontre dans les locaux d’Europe 1.
INTERVIEW RÉALISÉE PAR ANNE-CLAIRE DÉSAUTARD-FILLIOL
Il y a quelques années, vous disiez « être en quête et en attente de signes » pour avoir la foi, pour croire. Où en êtes-vous ?
Cette réponse faisait écho à un film que j’avais fait sur les mystères de la foi dans lequel j’avais rencontré des personnes qui m’avaient parlé de signes visibles et réalistes de l’existence de Jésus. Je me disais : « la chance qu’ils ont que Jésus se soit manifesté » ! Depuis, je me dis qu’il faut peut-être être attentif à ce type de signes pour tenter de les recevoir. Peut-être que je ne l’ai pas encore été assez. J’ai toujours l’impression d’être en quête de foi, d’une foi solide. Même si depuis quelques années, quand je vois l’ingéniosité des abeilles ou d’autres sociétés qui n’ont pas l’usage de la parole comme nous, je me dis que tout ça a un sens !
Si Dieu existe, on ne le saura jamais avec des preuves. D’ailleurs, si on avait la preuve, on n’aurait plus besoin de la foi. J’en arrive à me dire que malgré tout, même si un « Dieu horloge » n’existe pas, il a mis des épreuves terribles dans ma vie mais il m’a donné aussi des joies et des victoires. J’ai la chance d’être payé en parlant aux autres. J’écris mon premier roman chez Fayard. J’ai été gâté par la vie en quelque sorte. J’ai 60 ans cette année, on sait qu’on se rapproche de la fin même si je pense que je vivrai vieux ! La quête de la foi est permanente mais je n’y suis pas encore.
Qui est Dieu pour vous ?
Pour moi Dieu, c’est quelque chose qui est beaucoup plus grand que nous, qui nous dépasse, qui se mérite. Je crois avoir les capacités, les réceptacles pour recevoir cette foi mais je suis encore trop en colère. Je parle avec mon fils et mon père décédés, c’est une manière de montrer que je crois à quelque chose. Je prie souvent la Vierge Marie. Il y a beaucoup de statues et icônes de la Vierge chez moi. J’ai toujours accordé plus de confiance aux femmes qu’aux hommes.
Vous avez reçu une éducation catholique. Que gardez-vous de ce qui vous a été transmis ?
Je garde de mon éducation catholique le regard que je porte sur l’autre, le respect. Selon moi, tout réside dans le respect. Simone Weil disait : « la miséricorde est la conscience de l’autre ». Je vis avec ça. Il y a beaucoup de choses qui sont plus faciles à vivre avec cette idée. On peut évoluer avec la connaissance et la conscience de l’autre. Le fait de respecter l’autre fait grandir. Dans mon contact à l’autre, où que je sois dans le monde, je trouve une capacité à m’élever, à avancer, à apprendre. Vous me mettez sur une île, il y a de grandes chances que je régresse rapidement. Les gens aujourd’hui n’ont plus conscience de ça par peur de l’autre. Les gens ne s’écoutent plus, n’acceptent plus de l’autre un avis différent. On impose les choses aujourd’hui.
D’où vient la colère dont vous parlez ? Est-elle orientée contre vous ? Contre les autres ?
Longtemps j’ai souffert du syndrome de l’imposteur, d’ailleurs mon roman traite de ça. Mon éducation catholique m’avait porté sur l’amour du prochain. Sois bon avec l’autre, tends l’autre joue. Je crois que c’est parfois inapproprié dans ce monde qui est très dur. On ne peut pas accepter n’importe quoi. L’irrespect de l’autre est inacceptable. Quand j’ai réalisé que je me comportais bien et que je prenais des baffes dans la figure malgré ça, je me sentais trompé sur la réalité de ce monde. Longtemps j’ai cherché dans le regard des autres pour savoir si mes bonnes actions trouvaient grâce à leurs yeux. Mais les hommes ne sont pas si bons de nature. C’est la jungle ici-bas. En tous cas, c’est la réalité de mon monde aujourd’hui. Il y a beaucoup de gens bien, sensibles, gentils mais il y a un paquet de gens sans foi ni loi, sans valeurs. Malheureusement, ce sont souvent eux qui sont à la barre. La foi peut amener à être en paix par rapport à ça. Mais je reste en colère de voir des gens brillants sur le carreau pendant que des incompétents sont projetés au sommet.
La foi se gagne quand, au bout d’un chemin, on se dit « j’y suis arrivé ». Quand on regarde en arrière et qu’on voit tout ce qu’on a affronté…
La rencontre est très importante pour vous, dans votre vie comme dans votre travail. Elle semble être une vocation. Voir la beauté des âmes fragiles, qu’est-ce que ça vous apporte ?
Oui, j’aime les rencontres. Elles m’ont renforcé dans mes convictions. Nous ne sommes peut-être que des petites gouttes dans le monde, mais chaque chose que l’on fait ou que l’on donne peut contribuer à une mission plus grande. Ça me rappelle toujours les sœurs contemplatives que j’avais rencontrées dans un film de l’émission Dans les yeux d’Olivier où elles me disaient : « le fruit de nos prières retombe dans le monde mais on ne sait ni où ni quand ».
C’est ma manière d’avancer dans ma vie quotidienne. Je dis souvent à l’antenne qu’on peut commencer à faire le bien en bas de chez nous.
Vous êtes comme ceux que vous rencontrez : les épreuves vous font grandir ?
La vie m’a imposé des épreuves terribles, il a fallu que je m’en relève. J’étais en colère contre Dieu mais elle s’estompe. Je me sens apaisé parce que plus on avance dans la vie, plus on réalise que les épreuves, aussi dures soient-elles, vous élèvent. Quelque part, je sais où j’en suis. J’ai vu comment les épreuves ont élevé ma conscience par rapport à d’autres qui sont restés au même stade.
J’ai appris à larguer les amarres. J’avais du mal à me détacher car j’étais un grand sentimental ! Je le suis toujours d’ailleurs, mais avec plus de sens. Vouloir sauver les autres, c’est bien, mais la priorité, c’est de sauver les gens qui veulent être sauvés. Il y a en a d’autres qui ne le veulent pas.
On dit que le Seigneur transforme tout mal en bien. Que rien ne lui est impossible. Est-ce que ça vous parle ?
Oui. Je me suis dit qu’il fallait que je lise la Bible ! L’idée de Jésus qui est mort pour nous est quelque chose qui me percute. Quand je dis « qui me percute », c’est que je sens une vérité là-dedans. Il faut que je me penche sur la question car je connais seulement les films. Je ne lis que l’été et souvent j’aime lire des livres sur les mafias et autres (il rit) et après je me dis que je lirai Jésus ! Il faut que ça change !Quand vous citez cette phrase, toute épreuve vous amène un bien, c’est vrai. De toute façon, il n’y a pas le choix, soit vous décidez de baisser les bras, soit vous affrontez.J’avance avec quelque chose au-dessus de moi. J’en suis persuadé. Les gens qui ont une foi imperturbable, inébranlable me questionnent. J’aimerais l’avoir, je ne l’ai pas encore. Priez pour moi !
Que répondriez-vous à la question : qui êtes-vous ?
Je suis… (il réfléchit), un père, un ami, un collaborateur, un homme. C’est difficile cette question, qui je suis ! Je suis une voix dans la nuit, aussi à la télévision, un confident dans la vie comme dans mon métier, je suis quelqu’un de fiable, de courageux et fort je crois. Quelqu’un qui est en colère mais en même temps quelqu’un de fragile. Je suis un ami fidèle. La fidélité est très importante pour moi.
Est-ce que vous êtes aimé ?
Je crois que je lui suis.
Est-ce que vous êtes aimé par plus grand que vous ?
Je le crois aussi oui, je le pense. Je ne serais pas protégé comme je le suis. Même encore dernièrement. J’ai eu un accident de moto et c’est miraculeux que je ne sois pas handicapé. Je crois que je suis protégé. Des gens m’ont dit que je devais accomplir quelque chose sur cette terre. Je crois que j’ai quelque chose à accomplir. Je me sens accompagné dans cet accomplissement.
Selon vous, de qui s’agit-il ? Votre ange gardien ?
Je pense que c’est Dieu. J’ai très peur de l’éternité, de la mort. Mais en même temps, je sais que tout cela doit avoir un sens. Parfois je me dis que je ne me positionne pas de la bonne manière pour recevoir cette foi que je cherche. Il faut accepter sa destinée. Peut-être qu’elle va me toucher dans cinq minutes en sortant de cette interview ou juste avant ma mort. On est toujours sur le chemin de la quête d’une foi. Dieu est à nouveau dans ma vie comme un compagnon de route, une protection, quelque chose qui est là, qui m’aide à être moins en colère et à aimer les gens.