La culpabilité : comment en sortir ?

23 mai 2011

culpabilité

Bien vivre. Vraie ou fausse culpabilité : celui qui se sait ou qui se sent coupable a besoin de retrouver la paix du cœur. Passer de la culpabilité au pardon est essentiel dans nos vies pour vivre de bonnes relations avec nos proches.

François, 65 ans, se reproche le suicide de sa femme parce qu’il s’est disputé la veille avec elle. Julie, 32 ans, ne réussit plus à vivre en paix après un avortement. Christiane, 49 ans, ne se pardonne pas l’échec de sa vie conjugale… Être coupable ou se sentir coupable : qui n’a pas tour à tour vécu l’un ou l’autre état ? Le sentiment de culpabilité est la honte de ce que je suis. Il se manifeste de manières très diverses, selon les personnes. Certains éprouvent des difficultés à prendre du temps pour eux ; transforment le bonheur en malheur; s’accablent de reproches, se croient responsables des conflits de leurs proches ; n’acceptent pas les compliments ; se sentent insécurisés face aux autres ; font preuve d’un altruisme sans borne en s’oubliant eux-mêmes, etc. Ce sentiment semble souvent bénin vu de l’extérieur. Pourtant, il peut altérer la joie de vivre de celui qui l’éprouve. Pour s’en libérer, il est nécessaire de bien le comprendre. En effet, ce sentiment est le plus souvent sans lien avec la conscience d’une faute objective. Il porte davantage sur la valeur même de notre être. Comment se manifeste-t-il ? Par un ressenti de honte, d’indignité, qui traduit l’impression désagréable de ne pas être aimable, de ne pas être comme il faut. Nous nous sentons coupables, sans savoir pourquoi. C’est ce qu’on appelle la fausse culpabilité. Elle se traduit par une auto-dévalorisation, un complexe d’infériorité, une timidité, un manque de confiance en soi. D’où vient ce sentiment ? Des premières années de la vie, avant l’émergence de la conscience. Il est survenu à la suite de traumatismes ou de séparations trop brutales pour l’enfant. Il est d’autant plus intense que le lien affectif en cause était fort et que la blessure a été précoce, répétée, durable. Il est renforcé par les épreuves de la vie (rejet, chômage, humiliation, agression, divorce, etc.).

Manque de confiance

Pour faire face au manque de confiance en soi provoqué par ce sentiment de culpabilité latent, l’individu provoque certains comportements défensifs qui tentent d’améliorer l’image de soi. Objectif : être plus aimable et attirer l’affection de l’entourage. Ainsi, se mettra en place une tendance au légalisme (pour être irréprochable devant la loi) ou au perfectionnisme (pour être parfait aux yeux des autres), etc. Prendre conscience à l’âge adulte de cette tendance de fond qui guide inconsciemment les comportements permet de devenir vraiment acteur de sa vie : la personne peut désormais choisir de continuer à se positionner comme victime des autres ou, au contraire, assumer ses actes. Mais cela n’est possible qu’en exprimant notre souffrance, notre honte et notre angoisse, qui sèment un doute perfide sur la valeur inaltérable de notre personne. Il est fondamental de se rappeler aussi que nos actes, s’ils nous culpabilisent, ne résument jamais notre personne. Ce que je fais ne peut pas définir ce que je suis. Il faut dissocier la personne de ses actes, la déculpabiliser dans ce qu’elle est tout en la responsabilisant dans ce qu’elle fait (par l’aveu). De cette manière, elle grandit dans la vérité et la liberté. Elle retrouve sa dignité humaine. En travaillant à une juste estime de soi-même et de sa valeur. Cela sous-entend une certaine réconciliation intérieure, un pardon envers soi-même, par lequel nous renonçons à casser nos élans de vie, à nous complaire dans l’échec.

Plaider coupable

La vraie culpabilité, quant à elle, est la honte de ce que j’ai fait objectivement. C’est notre conscience qui peut nous éclairer sur la valeur de nos actes, distinguer ce qui est vrai de ce qui est faux, ce qui est bon de ce qui est mauvais, ce qui donne vie ou mort, ce qui est bien ou mal, ce qui est juste ou injuste, permis ou interdit. C’est la « conscience de raison ». Elle s’appuie sur notre intelligence et nous permet de juger des situations, de discerner. Si nous passons outre ses conseils et commettons volontairement une injustice, elle nous aiguillonne, nous inquiète en nous faisant des reproches parce que notre action n’a pas été dans le sens de la loi intérieure inscrite dans notre cœur et explicitée dans la plupart des grandes traditions humaines. Par exemple : tu ne feras pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu’on te fasse, tu ne voleras pas, tu ne tueras pas, tu quitteras ton père et ta mère (interdit de l’inceste). Cette loi intérieure est influencée pour une part par notre milieu éducatif et socioculturel. Elle peut aussi être obscurcie par de mauvaises habitudes, voire grâce à la réflexion, l’introspection, le dialogue avec autrui, nous pouvons prendre aussi conscience de certaines erreurs, maladresses et fautes que nous avons oubliées. Une fois la faute reconnue et avouée, nous pouvons nous excuser ou demander pardon, réparer, changer et nous améliorer.

La culpabilité : comment en sortir ?

Pervertie jusqu’à prendre un mal pour un bien (pédophilie, masochisme). La culpabilité désigne la faute et nous fait ressentir la honte de nos actes jusqu’à ce que nous acceptions de reconnaître comme vraie sa réprimande. C’est alors l’aveu – « c’est bien moi qui l’ai fait » – qui nous rétablit dans une vérité qui nous libère. Finis les reproches de notre conscience avec la honte et l’angoisse qui en découlent ! Par le regret conscient d’avoir manqué à l’amour et à la justice, nous retrouvons aussitôt la paix et la dignité de ceux qui assument pleinement la responsabilité de leurs actes et témoignent ainsi de leur liberté intérieure. Mais il faut reconnaître que la vérité nous fait peur quand elle nous compromet. Alors nous préférons nier plutôt que de reconnaître notre implication dans des actes déviants. C’est ce déni persistant d’une vraie culpabilité qui nous empêche de vivre sereinement jusqu’à ce que nous nous décidions à l’avouer.

Bernard Dubois

Ce pédiatre est le fondateur des sessions de guérison intérieure Agapè. Il est l’auteur de Guérir en famille et La libération intérieure

TEMOIGNAGE : «Elle m’a tuée !»

Claire a été adoptée. Elle porte en elle un fort sentiment de culpabilité lié à son histoire. Elle en a gardé un regard très négatif sur elle-même.

Claire, abandonnée à la naissance, a été adoptée à l’âge de deux ans. Un jour, à 4 ans, elle montre un dessin à sa mère en lui donnant l’explication suivante : « C’est une maman! Elle a un bébé dans son ventre. Il est tout couvert de sang. La maman est vilaine. Elle lui donne des coups de pieds. Elle le tape et lui crache dessus. Mais le bébé, il est très gentil, tu sais ! » Et elle frappe le dessin en répétant : « Elle est vilaine ! elle est vilaine ! » Sa mère intervient : « Et le bébé ? on le frappe aussi ? » – « Ah non ! Il n’a rien fait de mal! » dit-elle en proté- geant l’enfant de la main. Claire ne savait pas qu’elle avait été conçue dans la violence et non désirée. Ses parents le savaient par la DASS mais ne lui avaient rien dit en dehors de son adoption. Or, Claire semblait manifester par ce dessin qu’elle savait tout, comme si elle avait perçu, in utero, le drame qu’elle avait vécu avec sa maman naturelle. Elle en gardait l’impression d’être souillée. Huit jours plus tard, devant un autre dessin, tandis que sa mère lui demande : « Crois-tu que le petit bébé peut pardonner à sa maman ? », elle répond immédiatement : « Ah non ! » – « Pourquoi ? » – « Parce qu’elle m’a tuée ! » Elle venait d’exprimer, à la première personne, ce qu’elle allait progressivement conscientiser grâce au langage symbolique du dessin. Aujourd’hui, cette jeune fille a 26 ans et s’est libérée de ce sentiment de culpabilité diffus.

Sept clés pour… Retrouver la paix intérieure

La culpabilité peut-être bienfaisante. Elle peut nous apporter de précieux renseignements.

1 Écoutons notre culpabilité. Elle remet nos actes en question et nous interroge sur l’objectivité de la faute commise. Son reproche est-il justifié ? Si oui, cessons de nier, de nous disculper ou encore d’accuser autrui. Reconnaissons que cette action n’était pas au service de l’amour, de la vérité et de la justice. Avouons-le simplement et demandons pardon. Cherchons ensuite comment participer à la réparation, comment progresser et nous corriger de cette tendance. Si son reproche n’est pas justifié, passons sur le versant suivant de la culpabilité.

2 Soyons plus humble. Elle nous interpelle par son regard désapprobateur qui attise le sentiment de honte : ressentons-nous une déception, une accusation, un jugement, une condamnation de nous-mêmes ? Ne serait-ce pas dans ce cas l’expression d’un idéal du Moi qui ne correspond pas à la réalité, parce que surévalué ? Ce ressenti de honte véhicule indirectement l’appel à plus de vérité sur nous-mêmes. Renonçons à ce que nous aimerions être pour consentir aujourd’hui à ce que nous sommes vraiment, tout en gardant l’espérance de changer, de gagner en liberté intérieure.

3 Réconcilions-nous. Il existe un lieu pour recevoir le pardon de toutes nos fautes : c’est le sacrement de réconciliation. Tous les baptisés peuvent le recevoir s’ils désirent revenir vers Dieu de tout leur cœur. Et avec nos enfants ?

4 Une conscience droite et éclairée s’acquiert dès l’enfance. Pour cela, répondez autant que possible aux besoins fondamentaux du nourrisson par votre présence et votre amour. Exprimez-lui votre tendresse, par des paroles, des gestes, des services rendus, des moments de qualité, afin de remplir son réservoir émotionnel et lui donner la certitude d’être aimé inconditionnellement, même quand il fait des bêtises.

5 Valorisez votre enfant dans ce qu’il est. Ne confondez pas ses actes et son être. Ne dites pas par exemple : « Tu es méchant », mais « ce que tu as fait est méchant pour ton frère ». Encouragez-le, félicitez-le huit fois par jour là où vous le corrigeriez deux fois seulement. En agissant ainsi, votre enfant développera une juste estime de lui-même et grandira en confiance.

6 Instaurez très tôt un bon dialogue avec lui. Cela permet d’établir un solide lien de confiance réciproque. Partagez avec lui les joies et les peines de la vie en tenant compte de son âge, abordez les questions délicates en vérité. Félicitez-le quand il dit la vérité (« Faute avouée à demi pardonnée ») et accueillez sa demande de pardon sans lui faire de reproches. Puis apprenez-lui progressivement à réparer les conséquences de ses actes.

7 Osez reconnaître si besoin votre erreur devant lui, avouez-lui une faute, demandez-lui pardon. Votre autorité en sortira fortifiée. C’est un exemple essentiel pour que votre enfant se sente proche de vous et apprenne à le faire à son tour.

LEXIQUE 

Le scrupule est un doute, une hésitation par crainte de commettre une faute. Il est inspiré par une conscience très délicate ou mal éclairée qui exagère le mal ou le fait voir là où il n’est pas. Le remords (« se mordre à nouveau ») est une vive douleur morale causée par la conscience d’avoir mal agi, qui accuse et condamne. Le repentir est un sentiment de vif regret d’avoir fait (ou de n’avoir pas fait) une chose, avec le désir de la réparer, de s’en corriger et de ne plus la commettre. Le péché est une transgression consciente et volontaire de la loi divine.

Pour aller plus loin :

LA CULPABILITÉ, COMMENT S’EN SORTIR ? Denis Sonet, Chalet, 2001. COMMENT PARDONNER ? PARDONNER POUR GUÉRIR, GUÉRIR POUR PARDONNER Jean Monbourquette, Bayard, 2011. LA MISÉRICORDE DIVINE, Jean Paul II, Téqui, 1980. LE SACREMENT DE RÉCONCILIATION, MIRACLE DE L’AMOUR, Jacques Marin, Béatitudes, 2004.

 

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