ÉGLISE SAINT-ROCH DE PARIS : LA NATIVITÉ DE MICHEL ANGUIER

1 décembre 2021

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Les églises parisiennes débordent de trésors méconnus signés par les plus grands artistes de leur temps. Saint-Roch (Paris Ier) n’y échappe pas et renferme l’un des plus précieux inventaires d’art religieux, du XVIIe au XIXe siècles, qui soit parvenu jusqu’à nous : Falconet, Vien, Doyen, Le Sueur, Scheffer, Chassériau… Depuis la Révolution, l’église accueille un chef-d’œuvre de la sculpture baroque française : la Nativité de Michel Anguier, aussi appelée « Nativité du Val-de-Grâce ».

TEXTE ALEXANDRE MEYER – PHOTOS GILLES DE CAEVEL / MANEMOS.COM – JEAN-FRANÇOIS FORTCHANTRE

Église autant que musée, Saint-Roch s’est enrichie de nombreuses oeuvres d’art après la Révolution : des commandes passées par la Ville de Paris ou des pièces prélevées dans les églises vouées à la destruction par le percement des nouvelles voies d’une capitale en plein essor. L’une d’entre elles se distingue par son histoire, son sujet et la place singulière qu’elle occupe dans le majestueux édifice : la Nativité de Michel Anguier.

Son histoire d’abord : comme son nom l’indique, le groupe en marbre de Carrare, un peu plus petit que nature, fut sculpté en 1665 pour une autre église, située sur la rive gauche de Paris (voir page 21). Lorsque Notre-Dame du Val-de-Grâce sera rendue au culte au XIXe siècle, elle devra se contenter d’une simple copie…

Son sujet, ensuite, célébrant la naissance de Jésus de Nazareth et celle de « L’enfant du miracle » : le futur Louis XIV, après vingt-deux ans d’un mariage stérile.

Sa situation, enfin, juchée comme un retable sur l’autel de la chapelle de la Vierge, au premier plan d’un ensemble plus ample, mais très cohérent. En effet, en perspective, dans la chapelle du Calvaire au fond de l’église, apparaît un grand Christ crucifié éclairé par une baie invisible, que le petit enfant sur lequel sont affectueusement penchés Marie et Joseph semble désigner de la main. L’intention théologique du curé de Saint-Roch, Jean-Baptiste Marduel, qui réorganise son église au lendemain de la Révolution est claire : le mystère de l’Incarnation du Sauveur conduit au mystère de la Rédemption – du salut des hommes – par la Croix.

UN DRAME SE NOUE

Jésus, comme s’il était vivant, s’agite sur son coussin et se libère des langes qui l’enveloppent. Marie est agenouillée, calme, le regard lourd. Ses lèvres esquissent un sourire, mais ses mains se croisent sur sa poitrine, dans un geste d’humble préservation. « Marie retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur » (Luc 2, 19). Le drame de la Passion, déjà, se noue. Les mains grandes ouvertes de Joseph trahissent sa stupéfaction devant la beauté et la vigueur de cet enfant. Est-il sur le point de tomber à genoux ou se relève-t-il en comprenant soudain les paroles de l’ange : « Ne crains pas, l’enfant qui est engendré en elle vient de l’Esprit Saint » ?

LE SAViEZ-VOUS ? UNE NATIVITÉ EST UN TABLEAU OU UNE SCULPTURE REPRÉSENTANT LA NAISSANCE DU CHRIST ET LA SAINTE FAMILLE : LA VIERGE MARIE, SAINT JOSEPH ET L’ENFANT JÉSUS.

Pour décorer Saint-Roch, les plus grands artistes sont mis à contribution, dont deux frères, François et Michel Anguier (l’un est né en 1604, l’autre en 1612). Sculpteurs, ils se sont formés à Rome auprès de l’immense Bernin, surnommé « le second Michel-Ange ».

De très nombreuses personnalités du monde des arts et lettres ont été enterrées dans l’église : le jardinier du roi André Le Nôtre, les sculpteurs François et Michel Anguier, le dramaturge Pierre Corneille, l’encyclopédiste Denis Diderot, le peintre Fragonard…

EN DÉTAIL

SAINT-ROCH DE PARIS

Louis XIV pose la première pierre de l’imposante église Saint-Roch en 1653, les travaux seront menés sous la houlette de Jules Hardouin-Mansart, son architecte favori. Construite à cheval sur deux siècles, avec sa façade monumentale à deux niveaux – dans la tradition du modèle jésuite –, ses colonnades, sa coupole ou ses dorures, l’église mêle élégamment l’architecture baroque française et le style néo-classique, plus simple et épuré, inspiré par les antiquités grecques et romaines que l’Europe redécouvre.

Saint-Roch présente un plan original. Derrière le chœur ont été rajoutées successivement plusieurs chapelles alignées les unes à la suite des autres, offrant une perspective saisissante : chapelle de la Vierge, de la Communion, du Calvaire… 

Le jeu des perspectives permet au visiteur d’embrasser d’un seul regard la Nativité et la Crucifixion : deux œuvres magistrales, réunies par l’histoire et ses tourments, de la main d’un seul et même sculpteur : Michel Anguier.

UNE COMMANDE ROYALE

En 1637, Anne d’Autriche est l’épouse de Louis XIII depuis vingt-deux ans, mais la naissance du dauphin se fait toujours attendre. Une nuit de novembre, non loin du Louvre, dans la cellule d’un couvent aujourd’hui disparu, un religieux augustin est tiré du sommeil par les cris d’un enfant. La Vierge est là, environnée de lumière. « Mon enfant, n’ayez pas peur, dit-elle. Voici le dauphin que Dieu veut donner à la France… » À quelle condition ? Que la reine prie « trois neuvaines en son honneur ». Anne tombera enceinte un mois plus tard.

Folle de reconnaissance pour la naissance de l’enfant tant attendu, Anne commande la sculpture de la Nativité à Michel Anguier. Tout autour, elle fait édifier l’église du Val-de-Grâce (voir L’1visible n°101), pour remercier le Ciel de la naissance inespérée du futur Roi-Soleil.

À la Révolution, l’abbaye et son église deviennent un hôpital militaire et les œuvres sont dispersées. La Nativité d’Anguier est alors mise à l’abri à Saint-Roch.

POUR ALLER LOIN

www.paroissesaintroch.fr

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