L’Alliance Siméon est une alliance d’EHPAD associatifs non lucratifs, d’inspiration chrétienne et habilités à recevoir des bénéficiaires de l’aide sociale. Depuis fin août, plusieurs EHPAD adhérents reçoivent des animateurs pastoraux et spirituels. Découverte de cette nouvelle mission avec Jean-Bernard Prim, délégué général de l’Alliance Siméon.
TEXTE ANNE-CLAIRE DÉSAUTARD-FILLIOL
« Avec des associations gestionnaires d’EHPAD telles que Itinova, Monsieur Vincent, l’association Chemins d’Espérance, nous avons fondé l’Alliance Siméon », explique Jean-Bernard Prim. Son but : s’occuper de la souffrance spirituelle. En 1967, les anglo-saxons ont théorisé la souffrance (total pain) qui la définit en quatre domaines : la souffrance physique, psychologique, sociale et spirituelle. « Cette étude fut fondatrice dans les soins palliatifs. Malheureusement, les aumôneries se vident et les prises en charge spirituelles disparaissent des établissements. Notre objectif est de recruter et former des animateurs pastoraux et spirituels ». L’enjeu est de donner du sens à ce que vivent les personnes âgées. « Avec les contraintes économiques qui pèsent sur les EHPAD associatifs, les infirmières n’ont pas le temps de tenir une main. Notre rôle est de permettre aux résidents de trouver la paix intérieure. Il faut parfois apaiser des choses avec la famille, favoriser le pardon ». Dans ces lieux, l’espérance. Une relecture de la vie des personnes est permise, soit à la lumière de la foi, soit à la lumière des valeurs qu’elles ont reçues. Avec l’aide spirituelle, les dernières volontés sont accueillies. Une dame peut exprimer vouloir entendre du Bach à ses derniers moments quand une autre souhaite sentir le soleil sur sa peau. Tous ces détails, qui ne sont pas notés dans les documents administratifs, donnent sens à la fin de vie. « Nos animateurs sont chrétiens, mais leur mission est d’accompagner quelle que soit la croyance de la personne. Notre mission, dans ce cas, est de prendre contact avec le ministre du culte adéquate ». Angers, Toulon ou encore Marseille bénéficient déjà de cette présence spirituelle, notamment grâce à un financement par le Fonds du Bien Commun.
TROUVER DU SENS DANS LA FIN DE VIE
« Quand on leur offre un sourire, on a le sentiment d’apporter des merveilles ». Amélie de la Hougue est animatrice pastorale et spirituelle dans des EHPAD adhérentes à l’association Alliance Siméon. Une aventure vécue comme un trésor de partage et de foi.
A quoi ressemble le métier d’animatrice pastorale et spirituelle ?
C’est un nouveau métier qui se rapproche un peu des aumônières en EHPAD (Etablissement d’Hébergement pour Personnes Âgées Dépendantes). La première mission est d’être auprès des résidents quelle que soit leur confession, leur croyance. Nous avons à cœur d’être auprès d’eux pour apporter une présence, un soutien, une écoute, un réconfort, et enfin pour trouver du sens. L’objectif est de faire route avec les personnes que l’on rencontre.
Quelle place pour la foi dans ces établissements ?
Je commence depuis peu, mais il y a plusieurs personnes qui ont déjà lâché des fardeaux qu’elles n’avaient peut-être jamais vraiment déposés. Je suis quelqu’un d’extérieur et de neutre, cela permet une approche fraternelle. Je viens auprès de tous et de chacun. Même si je vais auprès de personnes non croyantes, je porte ma foi dans mon cœur. J’aime rejoindre les personnes dans leur vie, parfois dans leur solitude, leur souffrance. Si je suis avec une personne chrétienne, je propose de prier avec elle. Les entretiens sont souvent longs. Les clôturer par une prière avec simplicité est un moment privilégié sans prosélytisme ni jugement. Il y a l’aspect de l’accompagnement individuel mais il y aura bientôt des propositions collectives pour marquer les temps liturgiques importants de l’année. Ils seront ouverts à ceux qui le souhaitent. Cela permettra peut-être à des personnes éloignées de la foi de faire un pas vers le Christ. Leur chemin leur appartient.
Vous êtes sur Angers et sa région. Comment s’organise une journée en EHPAD pour l’animateur pastoral et spirituel ?
Je me déplace dans cinq établissements. Je passe environ une journée dans chaque EHPAD. Pour le moment, la mission démarre, on défriche le terrain ! En premier lieu, il faut apprendre à connaître le fonctionnement et l’organisation avec le personnel et les différents acteurs locaux. Avec l’Alliance Siméon, nous cherchons actuellement à bien définir notre rôle. D’un autre côté, je passe un maximum de temps dans les chambres auprès des résidents. Je vais parfois voir des personnes que l’on m’a recommandées en lien avec l’infirmière coordinatrice, l’animatrice ou les soignants. Récemment, je suis allé voir une dame très croyante dont le fils s’est suicidé. Elle était dans une pente descendante, un affaissement tout-à-fait compréhensible. Lorsque je suis arrivée, j’ai d’abord cherché la rencontre avec la personne. Très vite, elle a abordé le suicide de son fils parce que le sujet l’habitait. Elle a eu la place pour déposer son fardeau. J’ai accueilli ça pleinement et je l’ai rejointe dans cette souffrance comme j’ai pu. Nous avons prié ensemble, lu un psaume. Elle a dit « Oh comme c’est beau ! » C’ était comme un baume de réconfort pour elle. Je suis revenue la voir la semaine suivante et je pense que je vais aller la voir par petites touches régulièrement.
Quelles sont les ambitions de ce grand projet de soutien spirituel aux personnes âgées ?
L’idée est de pouvoir prendre le temps avec les résidents. Actuellement, l’enjeu est de trouver des bénévoles pour m’aider. Ils ont un rôle très important pour emmener les résidents à la messe, aider à l’organisation de temps collectifs et prendre du temps pour les écouter, les réconforter. A partir du mois d’octobre, je vais également suivre une formation d’aumônière sur deux ans pour m’aider dans la mission spirituelle et l’accompagnement. L’Alliance Siméon souhaite également prendre en compte d’autres souffrances spirituelles comme l’isolement ou le besoin d’utilité sociale.
Qu’est-ce qui vous amène, personnellement, à vivre cette expérience d’aide spirituelle auprès des personnes en fin de vie ?
Passer du temps avec les personnes âgées est un véritable trésor, que l’on soit jeune ou moins jeune. Pour moi, c’est une vocation ! Je suis remplie à la fois d’admiration et de respect pour les personnes âgées qui sont riches de leur vécu. Je ressens aussi de la compassion parce qu’elles vivent des déracinements, des dépouillements dus à l’âge ou à la dépendance. Je suis très touchée par ce que vivent les personnes âgées. Elles possèdent une sagesse acquise avec les années. Leur simplicité est belle. Quand on leur offre un sourire, on a le sentiment d’apporter des merveilles.
