Yann Arthus-Bertrand : good prophète

1 février 2019

1_Y Arthus-Bertrand©Quentin Jumeaucourt_2

Yann Arthus-Bertrand offre un écho généreux au cri du Pape pour la sauvegarde de l’environnement. À sa manière, l’écologiste répercute la voix du chef de l’Église catholique en faveur de la terre et de ses habitants.

Propos recueillis par Magali Michel

Il préside la fondation Good Planet. Les photos captées par son œil bleu et rieur ont fait le tour de la terre. Notre terre qu’il a tant de fois survolée amoureusement. Accaparé par la réalisation de son prochain film, Yann Arthus-Bertrand a pourtant trouvé le temps de s’associer au pape François en illustrant de ses images la lettre encyclique Laudato Si’. Tourmenté par la perspective d’une sixième extinction massive des espèces vivantes, le patriarche écolo s’avoue « un peu perdu ». Il nous encourage tous à une conversion spirituelle pour sauver la planète et permettre aux générations futures de la connaître dans toute sa splendeur.

Pourquoi vous êtes-vous associé au texte du pape François ?

Je cherchais le moyen de financer un orphelinat que je parraine à Brazzaville et, bien que non croyant, j’adore ce Pape. Il est formidable. J’aimerais retrouver sa simplicité chez tous les chefs d’État. Quand je lis ses mots, je me sens chrétien. J’ai toujours été attiré par les valeurs du christianisme. L’amour du prochain, la compassion, le partage… Aujourd’hui, seules ces valeurs sont capables de changer le monde. Mais pour avoir envie de changer le monde concrètement, chacun à sa place a besoin d’une profonde transformation de ses moteurs intérieurs. Nous avons besoin d’une « conversion ». La révolution écologique ne sera ni politique, ni économique, ni même scientifique, elle sera spirituelle ! Merci au pape François de nous aider à suivre cette voie.

Comment s’est passée votre rencontre au Vatican en décembre dernier ?

Trop fugace. Le pauvre est sollicité de partout. Mais il a tenu à dire bonjour à tout le monde sans privilégier les gens plus importants que les autres. On a parlé, je lui ai montré le livre et les photos. Il m’a fait comprendre que des gens attendaient derrière et m’a demandé de prier pour lui et basta (rires). J’ai juste eu le temps de lui remettre une lettre. J’aimerais proposer une grande journée nationale de l’environnement à date fixe dans les églises et une conférence planétaire organisée par le Vatican. On verra bien. La graine est semée… Il paraît qu’il lit son courrier et répond à tous ceux qui lui écrivent !

En attendant vous avez proposé une exposition itinérante de vos photos dans plusieurs églises…

Les églises sont un endroit rêvé pour échanger. On pourrait y réunir les croyants et les non croyants. On a proposé à toutes les églises de France une série de posters de mes photos en regard de phrases du Pape. Ce kit est mis à disposition à prix coûtant, un peu comme un chemin de croix de la planète.

Comment faites-vous pour ne pas croire en Dieu devant les merveilles du monde ?

Pour moi, Dieu a été inventé par l’homme. Je ne pleure pas devant un paysage, mais devant un visage. Je suis en admiration devant la vie. Le Pape parle de « la conscience amoureuse du monde ». Je cite souvent son expression. Il faut développer cette conscience amoureuse de la vie autour de soi.

Ne vous retrouvez-vous pas trop politiquement égratigné par le soutien que vous apportez au pape François ?

On doit tout essayer. Si le Pape parle écologie, notre boulot c’est d’en faire écho. Si les écolos qui sont plutôt des gens de gauche pas très catholiques se trouvent en admiration devant ce Pape, c’est plutôt une bonne chose !

Êtes-vous fâché avec la foi ?

Je me positionne comme un chrétien non croyant. La foi, tu l’as ou tu ne l’as pas. C’est un don peut-être. Il y a des gens qui ont la chance d’avoir cette foi. Moi, je ne l’ai pas. Je viens d’une famille très catholique, mais la religion de mes parents m’insupportait. Je dois pourtant reconnaître que parmi tous les gens croisés lors de mes voyages, ceux qui m’ont le plus marqué ont été des religieux. J’ai envie d’aider ces êtres formidables qui dispensent un amour inimaginable, avec une joie intérieure qui donne envie de leur ressembler. Lorsque je vois cela je me sens lié au message chrétien. C’est pourquoi j’ai souhaité que mes droits d’auteur pour le livre soient reversés à la sœur Ida. À Brazzaville, cette religieuse vit avec les enfants dont personne ne veut. Elle a créé une belle école pour ces handicapés mentaux et enfants autistes de la rue. Son action me touche. Tu remarques que ces femmes actives ne parlent pas beaucoup de Dieu, en revanche elles se donnent intégralement aux autres. Elles me font penser à ma tante. Elle est toute seule à cent ans dans sa maison de retraite, car tous ses amis sont morts. C’est vraiment épouvantable. Pourtant, quand je lui demande comment elle fait pour être toujours souriante, elle me répond : « Yann, ce n’est pas difficile, je ne pense pas à moi, je pense aux autres. » Elle a raison. C’est cela qu’il faut faire, penser aux autres et manger bio !

Qu’avez-vous fait de plus important dans votre carrière ?

Mon métier c’était d’aller photographier le monde. J’ai survolé la planète pendant trente ans, mais le plus important à mes yeux se trouve dans mon film Human. Plus grande encore que la beauté du monde, j’y donne à voir la beauté intérieure de l’homme. Et c’est le seul véritable espoir. Nous naissons tous avec ce réservoir d’amour inconditionnel. Il faut le retrouver, tous. En vieillissant, je m’aperçois que réussir sa vie d’homme, c’est entretenir ces qualités d’amour entre humains.

Quel est le sujet de votre prochain film ?

Woman, c’est la suite de Human réalisée à partir de 2000 interviews tournées dans le monde entier. C’est un film sur les femmes dans ce monde d’hommes. Il va sortir fin août. Ça va faire un malheur.

Entre la femme et la planète, voyez-vous un lien privilégié ?

Toutes les grandes héroïnes de l’environnement sont des femmes. Il y a un courage chez les femmes pour dénoncer les choses qui n’a pas d’équivalent chez les hommes. Il n’y a pas chez elles cette recherche du pouvoir. À mon avis, ce sont les femmes qui parlent le mieux d’environnement et d’écologie.

Sa fondation
« En 40 ans, j’ai vu le visage de la Terre changer. De mes voyages et de mes rencontres a découlé l’envie de bâtir un lieu de bienveillance consacré à l’écologie. C’est ainsi que la Fondation GoodPlanet a pris ses quartiers au Domaine de Longchamp à Paris. Nous en avons fait une « bulle verte » pour vivre gratuitement l’expérience d’une écologie généreuse et positive, en famille ou entre amis, pour les enfants comme pour les parents. Une expérience faite d’échanges et de rencontres. »
www.goodplanet.org

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