Guillaume le bienveillant

27 mai 2019

Révélé au grand public en 2007 par la série télévisée Fais pas ci, fais pas ça, Guillaume de Tonquédec est à l’affiche de Roxane, le premier film, émouvant et drôle, d’une toute jeune réalisatrice, Mélanie Auffret.

Guillaume de Tonquédec livre devant la caméra de Mélanie Auffret une prestation sensible et savoureuse. Il campe Raymond, un éleveur de poule plus vrai que nature. Passionné de littérature, il lit chaque matin du Cyrano de Bergerac à ses volatiles. Pourtant, l’avenir est sombre : l’exploitation n’est plus rentable et des repreneurs convoitent la ferme. Il faut se battre avec ses seuls moyens et surtout, son talent. Aux yeux du comédien, c’est plus qu’un simple rôle, c’est une mission.

Comment s’est passée votre rencontre avec la réalisatrice, Mélanie Auffret ?

Par le texte : j’ai reçu son scénario et j’ai eu un coup de foudre immédiat. Un type qui déclame des vers à ses poules, c’est quand même très étonnant ! Le fait qu’elle s’empare d’un tel sujet de société – le mal-être dans l’agriculture en France – m’a beaucoup touché. Cette jeune femme de 27 ans a puisé la matière d’une comédie sociale à l’anglaise dans ce sujet qu’elle connaît intimement. Le rire, la comédie et l’émotion sont forts car tout sonne vrai, tout est crédible.

D’ailleurs, le bleu de travail de Raymond, on dirait qu’il est à vous depuis quinze ans !

Il s’est imposé à moi, les bottes aussi ! On a fait un gros travail pour trouver la vérité des personnages. Pas question de faire une caricature, de me déguiser en paysan. Il fallait oublier l’acteur et raconter l’histoire de cet homme qui va se battre avec ce qu’il est.

Le film a une résonnance incroyable avec l’actualité…

Mélanie Auffret l’a pourtant écrit bien avant le mouvement social qui a débuté en novembre dernier, mais les grands auteurs et les artistes sentent le sens du vent, ils peuvent avoir des prémonitions dans leurs écritures. Elle est tombée pile dans l’actualité.

Les grands textes classiques portent le film de bout en bout ?

Ils ne sont pas dits pour faire joli, mais pour servir la situation. À chaque fois que je vois le film, je me fais avoir : j’ai les larmes aux yeux, alors que je sais ce qu’il va se passer ! Quand j’ai rencontré Mélanie, je voulais absolument faire ce film. Je lui ai dit : « Ne vous trompez pas, ne prenez pas un acteur plus cher et moins bon, prenez-moi ! » Elle ne pouvait pas le savoir mais, à l’instar de mon personnage, mon rapport personnel à la littérature a été très difficile au début, j’ai eu beaucoup de mal à apprendre à lire et à écrire.

Vous avez su transcender ce handicap par le théâtre, en dépit du qu’en-dira-t-on, comme notre agriculteur ?

Ce qui me bouleverse dans cette histoire, c’est que cet homme qui a quitté l’école à 16 ans, porte son amour de la littérature comme un secret honteux car il ne se sent pas légitime, il pense qu’il ne mérite pas la culture. Je trouve cela d’une injustice terrible. Il n’ose pas avouer sa passion à sa femme. Il est obligé de l’assouvir devant ses bêtes, car elles ne le jugeront pas. Il n’a pourtant rien d’autre pour se défendre face à l’adversité. C’est une belle métaphore de la vie. C’est là que le film touche à l’universel. Ce type est naïf et un peu ridicule, mais il met son coeur sur la table et ça me donne la chair de poule !

Raymond c’est un peu vous ?

© ROGER ARPAJOU – ADNP – TF1 DROITS AUDIOVISUELS – FRANCE 3 CINEMA – LES PRODUCTIONS JOUROR – SECTION 9 – MITICO

Le scénario est entré en résonnance avec l’histoire de ma vie. J’étais dyslexique et je ne voyais pas bien. On m’a donné des lunettes très tard, après l’apprentissage des savoirs fondamentaux et j’ai dû tout réapprendre seul. La littérature m’a sauvé la vie. Je le raconte dans mon livre, pour aider les enfants qui connaissent cette difficulté, ou un adulte qui garderait ces blessures de l’enfance.

Ce doit être amusant pour un comédien confirmé de jouer les grands débutants comme le héros de cette histoire ?

Ses poules ne l’écouteraient pas s’il était mauvais ! Il est bon, mais maladroit. Il a besoin de quelqu’un qui lui donne confiance. Il n’y a rien de plus beau en pédagogie que de donner confiance, d’être aidé par quelqu’un qui vous révèle à vous-même. Apprendre à être soi-même, c’est le chemin d’une vie entière. Ça a été mon apprentissage.

Le film parle de la France des petits bistrots…

Ces valeurs-là me parlent. Le bistrot n’est pas que le lieu de l’alcool, mais de la rencontre, de la poésie et de la musique, comme en Irlande. On y fraternise, toutes les couches de la société se rencontrent, y compris les ennemis d’hier.

Il donne aussi la part belle à la famille.

J’ai eu une grand-mère qui m’écoutait, comprenait tout avant tout le monde, parlait au bon moment, m’aidait à prendre les bonnes décisions et je me confiais plus à elle qu’à mes parents. Quand je lui ai parlé de ma passion pour le théâtre, elle m’a offert la Lettre aux artistes de Jean-Paul II en me disant : « Lis-ça ! Quand on a un don, il faut en faire profiter les autres, ce serait un pêché de ne pas en faire profiter les autres, de ne pas en faire ta vie. » Si ma grand-mère était d’accord et si Dieu me l’imposait, il fallait bien que je devienne comédien !

Et Dieu dans tout ça, qu’en reste-t-il ?

C’est une question brûlante car elle est sans cesse mouvante en moi. Une amie me disait : « Tu n’es pas seul », en parlant d’une présence possible de Dieu ou de Jésus à mes côtés. Évidemment que cela m’interpelle : il y a un mystère, il y a quelque chose qui se passe. C’est une source de réconfort et de questionnement.

Le film se déroule en Bretagne, c’est un pays que vous connaissez bien ?

Oui je suis originaire de là-bas, mais j’ai découvert la Bretagne rurale grâce au film. Je suis allé rencontrer des agriculteurs et je ne suis pas revenu indemne de mon petit stage agricole ! Les paysans savent qu’ils ne sont que de passage. La valeur de la transmission est fondamentale chez eux. La ferme est un héritage qu’ils se transmettent en famille. Perdre son exploitation, c’est perdre son identité. En les voyant, en vivant chez eux, j’ai été bouleversé. C’est pour ça que j’ai fait ce film : j’ai voulu être à la hauteur des gens qui m’avaient ouvert leur porte.

Pourquoi avez-vous décidé de faire ce métier ?

Ni pour l’argent, ni pour le clinquant, ni pour la gloire. Je voulais m’enrichir spirituellement : je considère mon métier comme tourné vers les autres. Je prends les gens par la main et je leur raconte une histoire. En ancien timide, c’est pour eux que je le fais, j’essaye de les entraîner dans l’imaginaire des auteurs que je joue. La popularité aurait pu ne jamais arriver. Avec la télévision qui me l’a apportée, vous devenez un intime des gens qui regardent, c’est le plus beau des cadeaux.

Le héros essaye de faire le buzz, mais il est rare qu’un buzz soit au service du bien.

Il faut user avec modération des réseaux sociaux. Je ne me permettrais jamais de donner mon avis publiquement sur ce qui se passe autour de moi. Ma façon à moi de faire de la politique, c’est de choisir mes films, de défendre certains personnages pour délivrer des messages de façon subliminale. Si l’on a été diverti, oublié ses problèmes ou pensé à appeler ceux qui galèrent autour de soi, à être solidaire, ce sera mon apport à la politique, voilà.

La ténacité fait-elle partie de ces valeurs ?

Oui à l’évidence. La vie est difficile, réussir sera long, on essuiera des revers, mais nous devons toujours essayer de nous en sortir. C’est un beau message d’espoir que j’avais envie de délivrer.

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